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La stèle gravée du Cimetière des Saints


( Commune de Lanrivoaré )





GPS : 48°28'27 N   4°38'18 W



Accès :    Le Cimetière des Saints est un enclos situé au pied de l'église de Lanrivoaré. On y accède en traversant le cimetière communal, à partir du grand parking. C'est près d'une tombe, devant l'enclos, que se dresse la stèle.



  Cette petite stèle du second âge du fer passe pratiquement inaperçue. Elle a été placée à l'extrémité d'un muret bas séparant l'église de l'espace réservé au cimetière. Elle n'a pas toujours été à cet emplacement car l'archéologue Etienne Morel l'avait décrite en 1924 comme étant située à une centaine de mètres de là, au lavoir du bourg, le long de la route de Ploudalmézeau. Couchée, elle servait alors de banc auprès du bassin.


On distingue une inscription verticale sur la pierre.

   D'une hauteur de 0,84 m hors sol, pour une section de 0,33 m, cette stèle en granite de l'Aber Ildut présente plusieurs particularités :
- Sa forme n'est que très légèrement pyramidale et son embase enterrée, brute de taille, ne la prolonge que d'une quarantaine de centimètres. Cette embase que l'on ne voit pas actuellement prouve bien qu'elle était destinée à une position verticale.
- De section carrée au début de la taille, elle a vu ses arêtes abattues afin d'obtenir 4 pans étroits de 7 à 8 cm de largeur.
- La face située vers l'allée présente de haut en bas, sur 65 cm de longueur et 8 à 10 cm de largeur une croix pattée suivie d'une inscription gravée de manière très soignée.



L'inscription a fait l'objet d'une étude de l'archéologue Pierre-Roland GIOT 1 publiée en 1952 dans le tome LIX, volume 2, des Annales de Bretagne. Grâce à des comparaisons avec les caractères de plusieurs manuscrits conservés en Irlande et en Angleterre, il a formellement identifié les lettres comme étant des onciales irlandaises du haut Moyen Âge utilisées entre les VIe et IXe siècles et dont la lecture est la suivante :



                 G    A    L   L      M        A          U

   La présence de la croix indique que cette stèle gauloise a été réemployée pour désigner une sépulture chrétienne. La forme même de cette croix aux branches égales et pattées était très répandue au haut Moyen Âge et de nombreuses autres stèles bretonnes épigraphes de cette époque en témoignent.
Le nom est sans doute celui du défunt. Mais si l'écriture est bien irlandaise, le nom de la personne ne l'est pas du tout. Il serait plutôt gallois et voudrait dire littéralement, selon P-R. Giot, «serviteur de l'étranger». La comparaison des onciales avec d'autres utilisées au Pays de Galles et en Cornouailles britannique pourrait faire remonter l'inscription au tout début de l'époque carolingienne ( Gildas Bernier, p.166).
   Vraisemblablement, la sépulture serait donc antérieure aux raids des Vikings. On pense évidemment au débarquement en Armorique des peuples de langue brittonique à l'origine de la Bretagne historique. Le défunt pourrait être l'un d'eux ou l'un de ses proches descendants.
   La stèle épigraphe de Lanrivoaré, dont la présence était totalement incongrue auprès du lavoir communal, a donc été judicieusement placée à proximité du Cimetière des Saints, dans la position verticale qu'elle avait déjà lorsqu'elle n'était pas encore gravée, soit mille ans avant son réemploi lors de l'émigration bretonne. Par contre, comme pour la grande majorité des stèles gauloises, il n'est pas possible de connaître son véritable emplacement d'origine.
Quoi qu'il en soit, elle constitue, en l'absence de mégalithes, le monument le plus ancien de la commune et l'un des plus intéressants témoignages de l'émigration bretonne dans le pays d'Iroise.


Merci à Jean-Yves Eveillard, maître de conférences en histoire ancienne à l'Université de Bretagne occidentale et chercheur au CRBC, pour son aide, ses conseils éclairés et ses prêts de documents.

Yannick Loukianoff

-1- Pierre-Roland GIOT ( 1919 - 2002 ) est considéré comme le fondateur de l'archéologie bretonne moderne. Il a écrit de nombreux livres et articles et fut conservateur du Musée de préhistoire de Penmarc'h. Sa publication concernant la stèle de Lanrivoaré est disponible sur internet : la stèle gravée de Lanrivoaré , p.218-220.

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EN SAVOIR PLUS


Marie-Yvane DAIRE
Centre Régional d'Archéologie d'Alet Supplément N°AB Rennes 2005



Gildas BERNIER
"Les chrétientés bretonnes continentales depuis les origines jusqu'au IXe siècle"
Travaux du laboratoire «Anthropologie-Préhistoire-Protohistoire-Quaternaire armoricains» Rennes 1982


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